Décryptons le  » Paquet Pouvoir d’Achat  » du gouvernement !

Deux Lois ont été adoptés par l’Assemblée Nationale concernant le  » Paquet Pouvoir d’Achat  » qui selon le gouvernement devrait permettre de répondre aux urgences sociales. Une première Loi concerne les  » mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat  » et une seconde est Loi de finances rectificative. Les deux textes contiennent des éléments qui auront des conséquences sur les salariés. Décryptons rapidement ces Lois sur le pouvoir d’achat mais sans augmentation de salaire qui privilégient le versement de chèques, de primes ou encore d’allègement de cotisations sociales qui in fine fragiliseront encore plus notre système de protection sociale.

Loi sur les mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat :

Prime de partage de la valeur qui sera exonérée de cotisations sociales et d’impôt ou de contributions sociales dans certains cas.

C’est un dispositif qui est mis en place pour clairement contourner la question des augmentations de salaire. Cette prime sera versée de manière aléatoire au bon vouloir des directions d’entreprise. Avec ce dispositif exonéré de cotisations sociales, les problèmes de pouvoir d’achat en activité seront les mêmes à la retraite puisque le calcul de la retraite repose sur un principe simple : seul les revenus sur lesquels nous avons cotisé entre dans l’assiette de calcul.

Ce dispositif ne répond pas au problème de fond qui reste la faiblesse des salaires. En revanche, elle s’inscrit parfaitement dans la stratégie du gouvernement de  » la bouffée d’oxygène  » qui obligera les salariés, pris à la gorge par l’inflation, à accepter cette prime ponctuelle à défaut d’autre chose.

Les cotisations sociales des indépendants vont baisser : exonération totale pour ceux dont le revenu est inférieur au SMIC.

Cette mesure va fragiliser encore un peu plus la Sécurité Sociale. C’est un nouveau renoncement aux principes fondateurs de la Sécurité Sociale en renforçant l’étatisation du financement.

L’intéressement pourra être mis en place de façon unilatérale par l’employeur dans les entreprises de moins de 50 salariés, même quand l’entreprise dispose d’une représentation du personnel. La durée de l’accord ou de la décision unilatérale peut aller jusqu’à 5 ans. C’est une vision toute particulière du dialogue social !

Avec cette mesure, le risque de voir l’intéressement remplacer les augmentations de salaires pérennes est renforcé. La toute puissance de l’employeur, c’est à dire son pouvoir discrétionnaire pour donner ou non des revenus est accentué.

Négociation salariale de branche et restructuration des branches professionnelles. Le constat est sévère pour les employeurs, à chaque augmentation du SMIC, le nombre de convention collective dont les minimas sont inférieurs au SMIC augmente également. Depuis l’augmentation du 1er mai, ce sont plus de 112 branches professionnelles qui sont concernées représentant plus de 5 000 salariés.

Pour lutter contre cela, la Loi prévoit que le délai pour ouvrir les négociations soit abaissé à 45 jours contre 90 jours aujourd’hui. La restructuration des branches pourra être imposée par le Ministère si ces dernières ont une faible activité conventionnelle.

Ces mesures seront-elles efficaces ? On peut en douter, car le gouvernement a oublié un élément essentiel. Certes, il y a une obligation de négociation pas de conclure un accord. Dans ces conditions, il suffit pour les employeurs de convoquer les organisations syndicales puis de refuser de signer pour satisfaire à leurs obligations.

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La mise en place d’une échelle mobile des salaires, répercutant automatiquement les augmentations de salaires dans les grilles conventionnelles, mais plus généralement sur les salaires serait assurément beaucoup efficace en matière d’augmentation de salaire et plus largement en matière de pouvoir d’achat.

Une revalorisation de certaines prestations sociales est anticipée au 1er juillet 2022. Il s’agit d’une augmentation de 4 % qui concerne certaines prestations sociales :

  • Les pensions de retraite et d’invalidité (régime de base).
  • Les allocations familiales.
  • Certains minima sociaux tels que le Revenu de Solidarité Active (RSA), l’Allocation Adulte Handicapé (AAH) et l’Allocation de Solidarité aux Personnes Agées (ASPA) l’ancien minimum vieillesse.
  • La prime d’activité.

Cette revalorisation est sélective car plusieurs aides ou prestations ne seront pas revalorisées telle que la Prestation de Compensation du Handicap. Plus largement, cette revalorisation est largement insuffisante car elle ne compense même pas l’inflation. Rappelons tout de même pour sortir des fantasmes autour du RSA entretenu par la droite, mais pas que, le montant du RSA pour une personne seule est de 575,22 € par mois, une fortune !

Le plafonnement des augmentations de loyer a été adopté par l’Assemblée Nationale. Pour l’année 2022, les loyers ne pourront pas augmenter de plus de 3,5 %. Augmentation des loyers de 3,5 % et revalorisation de 4 % des APL, d’aucun pourrait penser que cette mesure va améliorer le pouvoir d’achat des français. Eh bien pas vraiment puisqu’une augmentation de 4 % des APL ne couvre pas une augmentation de 3,5 % des loyers compte tenu de la différence de montant entre les deux.

Un petit exemple pour comprendre :

En 2021, le loyer moyen charges comprises était de 695 €, une augmentation de 3,5 % représente 24,33 €.

Toujours en 2021, l’APL moyen représentait 292 €, une augmentation de 4 % représente 11,68 €.

Vous l’aurez compris, si vous êtes dans la moyenne, il vous faudra débourser 12,65 € de plus chaque mois pour vous loger soit une augmentation de 151,80 € par an.

La seule mesure efficace aurait été le gel des loyers comme l’avait proposé les députés communistes. Plus largement, une politique de baisse des loyers devrait être menée pour permettre à tout le monde de se loger.

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La résiliation électronique des contrats et le renforcement des sanctions pénales en cas de pratique commerciale trompeuse ont été décidées dans cette Loi. Cela permettra aux consommateurs de résilier plus facilement leurs abonnements ou les assurances qu’ils souscrivent sur internet ou sur application mobile. Les vendeurs et assureurs devront prévoir, au plus tard pour février 2023, un dispositif de résiliation en ligne, facile et direct.

De plus, la Loi accentue les sanctions applicables en cas de pratiques commerciales trompeuses ou agressives.

Ces mesures vont dans le bon sens même si elles risquent d’être insuffisante compte tenu que la protection des consommateurs n’a cessé d’être affaiblie depuis plusieurs années par le Ministère de l’économie.

Le volet énergie de cette Loi camouffle des dispositions qui devraient être débattue dans le cadre de la mise en place d’un véritable Service Public de l’Energie.

La mise en place de ce grand service public mériterait un débat spécifique au Parlement et au-delà. Il devrait également aborder toutes les questions de la production à la diffusion avec comme objectif notre souveraineté énergétique. Vous l’aurez compris, l’énergie aurait mérité mieux que quelques articles ici ou là !

Un grand nombre de mesures proposées montre bien la vision uniquement à court terme du gouvernement. L’exemple le plus frappant est celui de la reprise du chantier du terminal méthanier au large du Havre. La capacité du pétrole de schiste à compenser la réduction du pétrole conventionnel est impossible sur le moyen terme. Il est donc très probable que le pic de pétrole soit atteint lors de la prochaine décennie. Pourquoi se lancer sur un projet aussi peu structurant alors qu’il pose un grand nombre de questions en matière de santé et sécurité des travailleurs mais également des habitants du territoire et alors que ses conséquences en matière environnementales seront nombreuses ?

De plus, le projet foule les dispositions en matière d’archéologie préventive, qui a pour objectif d’assurer, sur terre et sous les eaux, la détection et l’étude scientifique des vestiges susceptibles d’être détruits par des travaux liés à l’aménagement du territoire.

Il est urgent de trouver de véritables voies pour un véritable service public de l’énergie.

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Loi de Finance rectificative :

La défiscalisation des heures supplémentaires va être renforcée. Le plafond de défiscalisation va passer de 5 000 à 7 500 €. Pour faire simple, tous les revenus issus des heures supplémentaires ne seront pas soumis à l’impôt jusqu’à 7 500 €.

Certains pourront se réjouir de cette mesure, cependant, cette défiscalisation est autant d’argent qu’il va manquer pour les finances publiques, autant d’emploi qui ne seront pas créer, autant de conditions de travail qui vont se dégrader car contrairement à ce que pense le Président de la République, nous ne sommes pas corvéable à merci. Sans compter que le problème de fond n’est pas n’est pas régler : Doit-on faire des heures supplémentaires pour vivre dignement de son travail ?

La possibilité de racheter ses jours de RTT, le retour au travailler plus pour gagner plus. Avant d’aller plus loin, c’est déjà pas de chance pour ceux qui font réellement 35h par semaine, pour eux, circulez il n’y a rien à voir !

Pour les autres, avec l’accord de l’employeur, le salarié pourra renoncer aux journées ou demi journées acquises dans le cadre d’un accord de RTT du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023. Il travaillera donc plus longtemps et percevra une majoration de ces heures travaillées qui ne s’imputeront pas sur le contingent d’heures supplémentaires. Cette rémunération supplémentaire ne sera pas soumise à cotisations sociales, ni à l’impôt.

Cette mesure est donc un renoncement à ses droits. C’est particulier en matière d’augmentation de pouvoir d’achat. C’est surtout une bonne affaire pour les patrons qui pourront être exonérés de cotisations pour le paiement des RTT contrairement à aujourd’hui. Au final, c’est le salarié le grand perdant, les jours payés dans le cadre du dispositif gouvernemental n’entreront pas dans le calcul de leur retraite.

Non la suppression de la redevance télévisuelle n’est pas une bonne nouvelle !

La redevance audiovisuelle est supprimée même si le financement de l’audiovisuel public reste assuré par l’État. C’est un changement du mode de financement qui se traduira nécessairement par des réductions sur d’autres lignes budgétaires et donc une nouvelle dégradation du service public.

A l’heure où la concentration des médias dans les mains d’une poignée de milliardaires est plus forte que jamais, attaquer le service public de l’audiovisuel est d’une profonde gravité.

L’indépendance du service public de l’audiovisuel doit être assurée et renforcée, ce qui suppose de pérenniser ses ressources.

Le régime des frais réels de l’impôt sur le revenu sera modifié jusqu’au 31 décembre 2023. Ainsi, la déduction d’impôt est remplacée par un crédit d’impôt. Les personnes non imposables percevront alors un remboursement qui n’existe pas sous le régime de la déduction d’impôt.

Au fait, l’augmentation des salaires c’est bon pour l’augmentation du pouvoir d’achat aussi !

C’est tout de même particulier, la Loi sur le pouvoir d’achat ne prévoit aucune augmentation générale des salaires y compris le SMIC qui augmentera uniquement du niveau du dispositif légal. La multiplication de mesurettes n’aura quasiment aucun impact si l’on regarde l’inflation actuelle et celle prévisible d’ici la fin de l’année.

Les grandes multinationales du CAC 40 dont les profits explosent et les dividendes engraissent les actionnaires depuis des décennie ne mettront pas un centime supplémentaire pour les salaires. C’est pour eux la bonne affaire !

Si vous n’attendiez rien du gouvernement, eh bien vous ne serez pas déçus et tout de suite servis. Pour les autres, il va falloir trouvez les moyens d’imposer des augmentations de salaire.

Ces Lois vont aggraver l’affaiblissement des comptes sociaux avec de nouvelles exonérations de cotisations sociales. Déjà, chaque année, 150 milliards d’euros d’aides publiques sont versés aux entreprises sans aucune conditionnalité ni contrôle.

Le triplement du plafond de la prime « partage de la valeur » ne changera rien au fait qu’en moyenne son montant est de 506 euros et que 80% des salariés ne la touchent pas, notamment dans les petites entreprises.
Le rachat de JRTT n’est qu’un leurre dont le seul but est de faire travailler plus longtemps.

Il est urgent de prendre des décisions fortes en faveur de l’augmentation générale des salaires, des minima sociaux, du SMIC. C’est la voie à suivre pour permettre à tous de vivre dignement.

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